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Tages Anzeiger : “Explusions de requérants d’asile”

Tages Anzeiger : “Explusions de requérants d’asile”

Mardi, Novembre 1, 2022

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Dans un article du 24 août 2022, Nina Fargahi du journal Tages Ainzeiger interviewe Marine Zurbuchen, directrice de l’association elisa-asile sur la question des renvois au Sri Lanka :

L’article original en allemand (payant) est disponible en cliquant sur le lien ci-dessous.

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Traduction de l’article en français

Expulsions de requérants d’asile

Malgré le chaos qui règne dans le pays, la Suisse expulse des fugitifs vers le Sri Lanka

Le Sri Lanka connaît une grave crise économique. La situation est “catastrophique”, affirme l’Organisation mondiale contre la torture. Le Secrétariat d’Etat aux migrations ignore les avertissements.

Nina Fargahi

Publié : 24.08.2022, 11:26

En raison de la crise économique, des manifestants prennent d’assaut le palais présidentiel de Colombo, la capitale du Sri Lanka, le 9 juillet 2022.

“Tout simplement catastrophique”. C’est ainsi que l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) décrit la situation au Sri Lanka dans une lettre ouverte à la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter. Fin juillet, elle a demandé à la Suisse de stopper les expulsions. La crise actuelle ne permet pas de renvoyer des personnes au Sri Lanka. Le renvoi de demandeurs d’asile serait “à la fois humainement indéfendable et une violation des obligations juridiques de la Suisse au niveau international”.

Mais le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) fait signe que malgré la situation préoccupante sur place, “les procédures déjà closes ne seront pas réexaminées d’office”. Les personnes renvoyées par voie légale auraient toutefois la possibilité de déposer une demande ultérieure. “Chaque demande d’asile est examinée individuellement et en fonction des conditions réelles sur place”, précise le SEM. Actuellement, 443 ressortissants sri-lankais se trouvent en Suisse en cours d’exécution de leur renvoi.

Cela a fait réagir le Comité contre la torture de l’ONU, qui s’est adressé à la Suisse le 17 août. Il a demandé à la Confédération de suspendre l’expulsion d’une Tamoule qui vit en Suisse depuis 2018 et qui a reçu une décision d’asile négative. Il s’agit d’une personne qui a fui le pays pour des raisons politiques, qui a été arrêtée et torturée au Sri Lanka. Le SEM a immédiatement réagi et a suspendu la semaine dernière l’exécution du renvoi dans ce cas. Mais seulement dans ce cas. La Confédération continue de maintenir sa pratique de renvoi parce que “le Sri Lanka ne connaît actuellement pas de situation de violence généralisée”, selon le SEM. La Confédération prévoit plusieurs expulsions forcées vers le Sri Lanka dans les semaines à venir, selon des sources proches des droits de l’homme.

La Suisse risque à nouveau de violer l’interdiction de la torture

Marine Zurbuchen, directrice de l’organisation d’asile Elisa-Asile, représente la personne concernée dont l’expulsion a été suspendue suite à l’intervention de l’ONU. Elle se montre soulagée, mais déclare : “Tout le monde n’a pas la possibilité de porter son cas devant le Comité contre la torture de l’ONU avec un document de 50 pages et d’obtenir un arrêt des renvois”. Selon elle, la Suisse ne doit pas attendre que l’ONU ou une autre instance internationale se manifeste pour tirer le frein d’urgence. “Nous devons mettre en œuvre les obligations de droit international, même sans pression extérieure”.

La Suisse a été réprimandée trois fois par le Comité contre la torture de l’ONU au cours de l’année dernière. En 2013 déjà, la Confédération avait violé l’interdiction de la torture en expulsant un Tamoul et avait été condamnée pour cela par la Cour européenne des droits de l’homme. Pour éviter une nouvelle réprimande, Zurbuchen demande : “La Suisse doit accorder d’office une admission provisoire à tous les ressortissants sri-lankais tant que la situation n’est pas clairement stabilisée”.

“Il faut s’attendre à une détérioration de la situation”.

Département fédéral suisse des affaires étrangères DFAE

L’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) est également inquiète et demande un arrêt des renvois : “En raison de la crise économique actuelle, la sécurité alimentaire et les soins médicaux sont menacés, sans compter la situation problématique sur le plan politique et des droits de l’homme”. Le conseiller national PS Christian Dandrès est du même avis. Lui aussi demande un arrêt général des renvois et met en garde : “La Suisse doit s’attendre à ce que les personnes expulsées vers le Sri Lanka soient menacées dans leur vie et leur intégrité physique”.

L’Etat insulaire du Sri Lanka connaît actuellement une grave crise économique qui rend les denrées alimentaires, le carburant, les médicaments et les biens importés inabordables. Après des mois de manifestations de masse, le président a récemment fui à l’étranger. A peine assermenté, son successeur a fait démanteler le camp de protestation par la force et a arrêté les figures clés du mouvement de résistance. Le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) suisse déconseille actuellement tout voyage au Sri Lanka et écrit : “Il faut s’attendre à une détérioration de la situation”.

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